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Un accord a finalement été signé entre le Hamas et Israël sous l’égide des États-Unis, du Qatar et de l’Égypte. Un échange de prisonniers israéliens et palestiniens doit avoir lieu en trois phases de quarante-deux jours. Un cessez-le-feu qui pourrait amener la fin de la guerre, mais le chemin est semé d’embûches. Marwan Barghouti pourrait retrouver la liberté.

« Ça y est la guerre va se terminer. On va rentrer chez nous reconstruire notre maison. On va vivre comme les autres. » Quelques minutes avant l’annonce de l’accord révélé, un habitant du sud de la bande de Gaza et réfugié avec sa famille dans une école de Rafah, joint par téléphone, ne cachait pas sa joie.

Comme lui, des centaines de milliers de Palestiniens étaient en liesse, mercredi soir. Ils veulent croire qu’enfin, pour la première fois depuis plus de quinze mois, ils pourront s’endormir, certes dans le froid et pour beaucoup dans des abris de fortune, mais sans la peur d’être bombardés pendant leur sommeil.

Après que le premier ministre qatari, Mohammed ben Abdelrahmane Al Thani, a reçu les négociateurs du Hamas et, séparément, les Israéliens, cela ne faisait plus aucun doute. Sous l’égide du Qatar, des États-Unis et de l’Égypte, la trêve devenait réalité. Le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, devait, de manière formelle, soumettre l’accord à son cabinet de sécurité ce jeudi matin puis à l’ensemble de son gouvernement. Celui-ci doit encore l’approuver.

Libération des otages retenus à Gaza et libération de prisonniers palestiniens

Il prévoit trois phases de quarante-deux jours chacune avec, dès la première période, un arrêt temporaire des hostilités. Dès le premier jour, l’aide humanitaire avec d’importantes quantités de fournitures de secours et de carburant pourrait entrer dans la bande de Gaza. On parle de 600 camions par jour, dont 50 camions-citernes. Cela comprendrait le carburant pour la production d’électricité, le commerce, l’enlèvement des décombres et le fonctionnement des hôpitaux, des cliniques et des boulangeries.

Commencerait alors la libération en plusieurs fois des 94 Israéliens encore détenus dans l’enclave. Durant la première étape, 33 d’entre eux retrouveraient la liberté. Il s’agira d’abord des femmes, des enfants et des personnes de plus de 50 ans ainsi que des blessés.

Pour chaque Israélien relâché, Tel-Aviv libérera 30 femmes ou mineurs palestiniens et, pour chaque soldate israélienne, 50 prisonniers palestiniens. Selon l’accord, le premier jour – qui entrera en vigueur dimanche –, le mouvement islamiste palestinien élargira trois Israéliens détenus puis quatre autres le septième jour puis trois tous les sept jours. Dans la sixième semaine les 33 seront donc libres, idem pour le nombre de Palestiniens correspondants, soit près de 1 millier.

Au cours de la première phase de l’accord proposé, les troupes israéliennes doivent se retirer dans une zone tampon d’environ 1 kilomètre de large à l’intérieur de Gaza, le long des frontières avec Israël. Cela permettra aux Palestiniens déplacés de retourner chez eux, notamment dans la ville de Gaza et dans le nord du territoire. La population de l’enclave palestinienne a été refoulée dans d’immenses camps de tentes sordides, et beaucoup ont vu leurs maisons détruites ou gravement endommagées par les bombardements intensifs de l’armée israélienne.

Le positionnement de l’armée israélienne à Gaza en question

Les premières difficultés de ce cessez-le-feu pourraient advenir sur cette question de positionnement des troupes israéliennes. Tout au long de la guerre, celles-ci ont séparé le nord de la bande de Gaza en contrôlant le corridor de Netzarim, qui traverse le territoire d’est en ouest et où elles ont installé des bases.

Cela leur a permis de fouiller les personnes fuyant le nord vers le centre de Gaza et d’interdire à quiconque de revenir. Selon l’accord, les soldats israéliens doivent quitter cet endroit. En revanche, durant cette phase, Israël devrait conserver le contrôle du corridor Philadelphie, la bande de territoire longeant la frontière entre Gaza et l’Égypte, y compris le passage de Rafah.

La deuxième phase devrait alors débuter par une déclaration de « calme durable ». Le Hamas libérera les derniers otages masculins (soldats et civils) en échange d’un nombre de prisonniers palestiniens encore à négocier et d’un retrait total des troupes israéliennes de la bande de Gaza. Dans cette phase, Marwan Barghouti, le très populaire leader palestinien, dirigeant du Fatah, et Ahmed Saadat, secrétaire général du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), pourraient enfin sortir des geôles israéliennes.

Mais, selon nos informations, Israël refuserait qu’ils puissent retourner en Cisjordanie et imposerait un exil. Des conditions qui pourraient encore être discutées. Enfin, lors de la troisième phase serait envisagé un plan global de reconstruction de la bande de Gaza. Ce n’est qu’au moment de cette dernière période que les frontières pourraient être rouvertes.

« Nous avons un accord sur les otages au Moyen-Orient. Ils seront libérés bientôt », a rapidement annoncé le prochain locataire de la Maison-Blanche, Donald Trump, mercredi sur son réseau Truth Social. Le milliardaire peut se réjouir. Même Netanyahou n’a pas pu se dérober à la volonté de son grand ami américain de commencer son mandat le 20 janvier avec cette victoire. N’avait-il pas promis « l’enfer » si un accord n’était pas trouvé ?

L’avenir en suspend

Dans un communiqué, Gershon Baskin, initiateur et négociateur de discussions secrètes entre Israël et le Hamas, notamment en 2011, rappelle que « l’accord conclu est sur la table depuis la fin du mois de mai. Nous, les peuples (israélien et palestinien), devons demander des comptes à ceux qui sont directement responsables du retard de l’accord jusqu’à l’arrivée de Donald Trump et de son ordre de ”faire en sorte que cela se réalise”. À quel point nos dirigeants peuvent-ils être cyniques ? C’est tout à fait honteux ».

Si les Gazaouis se réjouissent, de même que les familles de captifs israéliens qui vont être libérés, la question est de savoir si le cessez-le-feu survivra à la première phase de l’accord. Celle-ci est cruciale pour que la cessation des combats se transforme réellement en fin de la guerre. Dans une bande de Gaza détruite à 80 %, où plus de 46 000 personnes ont été tuées et au moins 110 000 blessées, se posent non seulement la question de la reconstruction mais également celle de l’avenir.

À Oslo, le ministre norvégien des Affaires étrangères, Espen Barth Eide, a relevé qu’« un cessez-le-feu était une condition préalable à la paix, mais ce n’est pas la paix ». Israël « doit comprendre ce qui est juste et ce qui est injuste, et que le pouvoir de veto sur la paix et l’État palestinien ne sera plus accepté ni toléré », a renchéri le premier ministre palestinien, Mohammad Mustafa. Malgré les milliers, voire les millions, de tonnes de bombes déversées par l’aviation israélienne pendant plus de quinze mois, le drapeau palestinien continue de flotter sur Gaza.

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